Alors d’abord, on ne respire pas forcément par le nez: il arrive, selon les professeur.e.s et leur partage d’expérience, que proposition soit faite de respirer par la bouche pour certaines pratiques bien particulières.
Comme vous l’aurez peut-être remarqué, nombreuses de nos expériences du quotidien sont transposées de façon codifiée dans les pratiques de Yoga, quand elles n’y sont pas carrément renversées. Dans le quotidien, selon les situations, nous respirons par le nez ou par la bouche. La respiration par la bouche est considérée comme la « respiration d’urgence »: besoin de s’oxygéner davantage au moment de courir par exemple; ou encore, complètement enrhubé, nez bouché, ne reste plus que la bouche pour subvenir au besoin vital et urgent de respirer. De nombreuses autres situations routinières nous amènent à respirer par la bouche: parler, tousser, éternuer, chanter, crier… et certaines situations de douleur ou de plaisir intense.
Cependant, physiologiquement, le nez est considéré comme le principal point de passage pour inspirer et expirer l’air. Il rassemble toutes les composantes assurant une respiration fonctionnelle: il réchauffe, humidifie et filtre l’air avant son entrée dans les poumons.
Les composantes dans le détail
Les cornets nasaux (petits os formant une série de replis dans la cavité nasale) augmentent de façon considérable la superficie de la cavité nasale, permettant ainsi un échange plus efficace de chaleur et d’humidité. La muqueuse tapissant les cavités nasales, riche en vaisseaux sanguins, assure les mêmes fonctions. Ses cellules présentent de fines projections ciliaires (cils) et produisent du mucus. Le mucus capte les impuretés inhalées, évacuées ensuite par les cils soit à l’expiration vers l’extérieur (en se mouchant, par exemple), soit vers la partie antérieure du nez ou vers la gorge. C’est ainsi que les impuretés sont éliminées des voies respiratoires.
A travers ces multiples « actions nasales », on comprend qu’inspirer par le nez permet la purification de l’air avant qu’il n’entre dans les poumons, tandis qu’expirer par le nez, action tout aussi importante, permet l’évacuation des impuretés qui sinon stagnent dans les cavités, empêchent une filtration efficiente, et finissent par créer l’obstruction des voies respiratoires supérieures et à terme d’autres formes de déséquilibres plus ou moins importants.
La tradition du Yoga, dont les pratiques se basent sur nos expériences du quotidien pour les questionner, les revisiter, les célébrer, les sublimer, les transcender, etc. parle effectivement de deux types d’activités respiratoires (dites aussi « activités énergétiques » car effectivement basées sur la source d’énergie qui nous maintient en vie, en dehors de tout propos ésotérique): nasikya prâna et mukha prâna. Littéralement: activité respiratoire utilisant comme porte d’entrée-sortie les narines (nasikya), ou la bouche (mukha). Et « prâna », c’est quoi? il nous faudrait un autre article pour traiter de ce sujet, le Sanskrit – langue indo-européenne – offrant un large pannel d’interprétations pour son vocabulaire si riche… et quelque peu mystérieux. Alors si ça vous intéresse, sonnez la cloche!
Du point de vue du Yoga toujours, le corps d’énergie (prânamaya) est constitué de 72000 nadis, ou voies de circulation de l’énergie et des sensations, que l’on peut comparer de façon cavalière aux méridiens chinois, ou de façon approximative aux circuits nerveux faisant circuler les sensations et informations recueilles continuellement par la conscience. De ce point de vue, précisons ici qu’activité respiratoire et mouvements de la conscience sont indissociables au cœur de la pratique.
Nous empruntons dans une pratique efficace du Yoga un très grand nombre de ces nadis, et lors de certaines pratiques de prânâyâma, plus spécifiquement encore 2 nadi principaux correspondant aux 2 voies démarrant à l’entrée des 2 narines – nommés « ida » ou « chandra » (narine gauche) et « pingala » ou « surya » (narine droite) – dont le trajet peut être perçu dans la cavité dorsale, le long de l’axe de la colonne vertébrale.
Une pratique lors de laquelle ces deux nadis sont correctement et régulièrement empruntés, libère l’individu d’empreintes, résistances et obstacles physiologiques et psychologiques,
et amène le pratiquant, progressivement ou soudainement, à la perception de la circulation de prâna, compris ici comme énergie vitale, le long de la nadi ou voie centrale dénommée susumna. S’ouvrir à susumna ne doit pas être un but en soi (mieux vaut pratiquer le Yoga sans but)… mais textes et maîtres le sous-entendent: ce serait dommage de s’en priver!
Au regard de ces explications, respirer uniquement par la bouche, ou même inspirer par le nez puis expirer par la bouche, y compris lors des pratiques posturales, n’aura absolument pas la même incidence que d’inspirer et d’expirer par le nez.
Espérant que mes propos soient clairs, n’hésitez pas à réagir et à nous poser toutes vos questions sur le sujet, par mail ou au Centre!
& en attendant… bon nez bon œil!